{"id":314,"date":"2015-01-28T11:57:38","date_gmt":"2015-01-28T11:57:38","guid":{"rendered":"https:\/\/betemps.eu\/?p=314"},"modified":"2019-07-11T22:18:33","modified_gmt":"2019-07-11T20:18:33","slug":"la-fete-des-conscrits-2","status":"publish","type":"post","link":"https:\/\/betemps.eu\/la-fete-des-conscrits-2\/","title":{"rendered":"La f\u00eate des conscrits."},"content":{"rendered":"
Alexis B\u00e9temps<\/em><\/strong><\/p>\n in “Bulletin du Centre d\u2019Etudes francoproven\u00e7ales \u00ab Ren\u00e9 Willien \u00bb de Saint-Nicolas”, 59, Aoste, 2009<\/p>\n La f\u00eate en mouvement <\/strong><\/p>\n Il y a des f\u00eates qui naissent, qui durent quelque temps, puis qu\u2019elles disparaissent et sont oubli\u00e9es ; d\u2019autres, venues pourtant de la nuit des temps, qui d\u00e9clinent et se perdent aussi; d\u2019autres encore, dont on a dit qu\u2019elles ont toujours exist\u00e9, qui ont surmont\u00e9 des crises, brav\u00e9 le temps et qui, \u00e0 chaque ann\u00e9e, semblent plus jeunes, toujours \u00e9gales mais nouvelles.<\/p>\n C\u2019est ce dernier type de f\u00eates qui a souvent retenu mon int\u00e9r\u00eat. Qu\u2019ont-elles de si puissant qui les a fait traverser les g\u00e9n\u00e9rations sans fl\u00e9chir, sans que l\u2019amour de leurs fid\u00e8les ne s\u2019affaiblisse ?<\/p>\n En Vall\u00e9e d\u2019Aoste, elles ne sont pas nombreuses. C\u2019est le cas de certains carnavals qui sont all\u00e9s jusqu\u2019au point de s\u2019\u00e9teindre (vers les ann\u00e9es 1970) pour se reprendre vigoureusement et attirer maintenant des spectateurs venant de tr\u00e8s loin. C\u2019est le cas aussi de certaines processions en altitude, celles de Notre-Dame des Neiges, fourr\u00e9es de touristes, qui, le 5 ao\u00fbt, atteignent des petits sanctuaires au dessus des 2000 m\u00e8tres.<\/p>\n Et c\u2019est le cas de la f\u00eate des conscrits, toujours vitale, en ce d\u00e9but de troisi\u00e8me mill\u00e9naire, sans m\u00eame avoir besoin de cligner de l\u2019\u0153il aux touristes\u2026<\/p>\n Tradition et renouveau<\/strong><\/p>\n Quand on les regarde d\u2019un peu plus de pr\u00e8s, quand on les \u00e9tudie, ces f\u00eates, la premi\u00e8re constatation est qu\u2019elles ont chang\u00e9 et qu\u2019elles changent encore ; qu\u2019elles changent \u00e0 chaque ann\u00e9e sans jamais trop s\u2019\u00e9carter des \u00e9ditions pr\u00e9c\u00e9dentes. Un petit peu \u00e0 chaque ann\u00e9e, on ne se rend pas compte des mutations, mais, quand le regard du chercheur a le bonheur de pouvoir s\u2019\u00e9tendre sur une p\u00e9riode suffisamment longue de leur histoire, disons un si\u00e8cle ou un peu plus, alors on peut se rendre compte de l\u2019\u00e9volution, constater les diff\u00e9rents passages et comprendre ce qui s\u2019est pass\u00e9 et qui n\u2019est pas toujours \u00e9vident\u2026<\/p>\n En partant de l\u2019observation on pourrait \u00e9laborer des th\u00e9ories complexes pour expliquer leur \u00e9volution et leur persistance. Mais une chose est \u00e9vidente et on peut l\u2019affirmer sans besoin de perdre trop de temps pour des recherches : une f\u00eate demeure vitale du temps qu\u2019elle sait tenir le pas de l\u2019histoire, du temps qu\u2019elle a la force de se renouveler, la capacit\u00e9 de refondre la tradition et de s\u2019adapter aux exigences nouvelles. Et ajoutons encore : du temps qu\u2019elle sait se faire aimer\u2026<\/p>\n L\u2019\u00e9ternel retour<\/strong><\/p>\n Je n\u2019ai pas fait la f\u00eate des conscrits parce que \u00e0 Valgrisenche, la commune de ma famille, c\u00f4t\u00e9 maternel, nous n\u2019\u00e9tions qu\u2019\u00e0 deux n\u00e9s en 1944, peut-\u00eatre trois. En 1944, la guerre n\u2019\u00e9tait pas finie et les hommes \u00e9taient encore au front. Sauf quelques uns, comme mon p\u00e8re qui \u00e9tait venu en licence quelques jours avant la d\u00e9faite italienne du 8 septembre 1943 et qui n\u2019avait plus pu regagner sa compagnie, en Gr\u00e8ce. Les conscrits de Saint-Christophe, o\u00f9 je suis n\u00e9, avaient bien dit \u00e0 mon p\u00e8re qu\u2019ils m\u2019auraient accueilli volontiers dans leur petit groupe mais je les connaissais moins, depuis trop de temps j\u2019habitais en Ville. Et quand je n\u2019y \u00e9tais pas retenu par les \u00e9tudes, j\u2019allais \u00e0 Valgrisenche plut\u00f4t qu\u2019\u00e0 Saint-Christophe.<\/p>\n J\u2019ai renonc\u00e9 \u00e0 la f\u00eate sans souffrir beaucoup parce que l\u2019air de la ville, celle que je respirais le plus souvent, n\u2019\u00e9tait d\u00e9j\u00e0 plus faite pour les conscrits\u2026<\/p>\n Mais trente ans apr\u00e8s, retourn\u00e9 \u00e0 Saint-Christophe, j\u2019ai v\u00e9cu indirectement l\u2019exp\u00e9rience des conscrits \u00e0 travers mes enfants villageois, d\u00e9sormais quasi adultes.<\/p>\n