{"id":323,"date":"2015-01-28T23:58:17","date_gmt":"2015-01-28T23:58:17","guid":{"rendered":"https:\/\/betemps.eu\/?p=323"},"modified":"2019-07-11T22:17:57","modified_gmt":"2019-07-11T20:17:57","slug":"toponymie-rurale-et-memoire-narrative","status":"publish","type":"post","link":"https:\/\/betemps.eu\/toponymie-rurale-et-memoire-narrative\/","title":{"rendered":"Toponymie rurale et m\u00e9moire narrative"},"content":{"rendered":"

                                                                 Alexis B\u00e9temps   <\/em><\/strong><\/p>\n

in Toponymie rurale et m\u00e9moire collective (la Vall\u00e9e d\u2019Aoste), in R\u00e9cit et toponymie, Rives nord- m\u00e9diterran\u00e9ennes<\/em>, 2e<\/sup> s\u00e9rie, Aix-en Provence, 2002.<\/p>\n

 Les toponymes sont des signes d\u2019appropriation du territoire de la part de l\u2019homme. Dans la soci\u00e9t\u00e9 agropastorale traditionnelle vald\u00f4taine, pauvre et autarchique, o\u00f9 tout espace quelque peu rentable devait \u00eatre occup\u00e9 et exploit\u00e9, l\u2019appropriation du territoire a \u00e9t\u00e9 progressive et intensive. La moindre parcelle de terrain, les cours d\u2019eau, les bois, les chemins, les cols, les ponts, les rochers : tous avaient un nom. Et pour le choix du nom, l\u2019homme a toujours puis\u00e9 dans son exp\u00e9rience et dans son imagination. Ainsi, dans la toponymie nous pouvons trouver les traces des activit\u00e9s humaines, de l\u2019organisation sociale, des mutations climatiques, des changements linguistiques, de l\u2019imaginaire collectif ou individuel, bref, de l\u2019histoire m\u00eame de la communaut\u00e9 (1). Ce patrimoine, fruit d\u2019une s\u00e9dimentation s\u00e9culaire, chez nous comme dans la plupart des communaut\u00e9s du m\u00eame type, est en danger de disparition rapide : quand la terre n\u2019est plus travaill\u00e9e, elle perd ses noms en m\u00eame temps que sa productivit\u00e9. En 1987, une enqu\u00eate syst\u00e9matique sur tout le territoire vald\u00f4tain (326.226 hectares pour 74 communes) a \u00e9t\u00e9 lanc\u00e9e. Dans une soixantaine de communes l\u2019enqu\u00eate est achev\u00e9e et dans d\u2019autres elle est en cours. Plus de soixante mille toponymes ont \u00e9t\u00e9 recueillis (2). Les donn\u00e9es de 25 communes, pour un total d\u2019environs 28.000 toponymes, ont d\u00e9j\u00e0 \u00e9t\u00e9 saisies et c\u2019est surtout sur ce corpus que j\u2019ai travaill\u00e9. Les informations, g\u00e9n\u00e9ralement succinctes, fournies par l\u2019enqu\u00eate ont \u00e9t\u00e9 int\u00e9gr\u00e9es par l\u2019apport de t\u00e9moignages oraux, de recueils de contes, de monographies paroissiales, tr\u00e8s nombreuses chez nous, d\u2019ouvrages divers, tous rappel\u00e9s dans la bibliographie qui accompagne ce texte.<\/p>\n

Chez nous, la plupart des toponymes, noms anciens \u00e0 l\u2019\u00e9tymologie incertaine ou myst\u00e9rieuse, noms plus transparents \u00e0 l\u2019\u00e9tymologie commun\u00e9ment accept\u00e9e, ne sont pas ou ne sont plus reli\u00e9s \u00e0 des r\u00e9cits. Donc, la liaison toponymie\/r\u00e9cit n\u2019est pas la norme. Cependant, sur la quantit\u00e9 analys\u00e9e, un bon nombre de r\u00e9cits \u00ab toponymiques \u00bb r\u00e9sultent de la recherche. La rencontre entre le toponyme et le r\u00e9cit se r\u00e9alise essentiellement de deux mani\u00e8res. La premi\u00e8re se fait par l\u2019\u00e9tymologie populaire : le toponyme est expliqu\u00e9 par sa consonance avec un ou plusieurs mots bien pr\u00e9sents dans le langage courant. Autour de ces mots, des r\u00e9cits sont invent\u00e9s ou adapt\u00e9s pour \u00eatre associ\u00e9s au toponyme. Par exemple, le hameau de Gerbore, dans la commune de Saint-Nicolas, bien expos\u00e9 au soleil, lieu traditionnellement privil\u00e9gi\u00e9 pour les c\u00e9r\u00e9ales, tirerait son nom du fait qu\u2019un espagnol fugitif, voyant les champs en terrasse qui entouraient le hameau, s\u2019exclama en bon fran\u00e7ais : \u00ab Ah ! Quelles belles gerbes d\u2019or ! \u00bb (3) ; le gouffre de Guillemaure, creus\u00e9 par le torrent Lys dans la vall\u00e9e homonyme, plus connue comme vall\u00e9e de Gressoney, passage oblig\u00e9 pour tous les voyageurs, \u00e9tait fr\u00e9quent\u00e9 par un aubergiste-brigand. Le jour o\u00f9 il fut tu\u00e9 par un groupe de jeunes, un cri de soulagement se leva de toute la vall\u00e9e : \u00ab Guillaume est mort, Guillaume est mort ! \u00bb (4); ou encore, \u00e0 Emar\u00e8se, une pente raide est appel\u00e9e Settarma. On raconte de sept adolescents, morts dans un ravin, en hiver, d\u2019un accident avec la luge. Arma, dans la vari\u00e9t\u00e9 locale de francoproven\u00e7al signifie \u00e2me, donc Settarma=sept \u00e2mes (5). A Valgrisenche, on attribue la fondation des diff\u00e9rents hameaux \u00e0 des bergers savoyards \u00e0 la poursuite d\u2019un taureau enfui des alpages de Ste-Foy en Tarentaise par le col du Mont. A chaque halte du taureau, un hameau est fond\u00e9 prenant un nom s\u2019inspirant de la situation. A Chapuis les bergers commencent \u00e0 sentir froid et se mettent un chapeau, \u00e0 Fornet, ils s\u2019arr\u00eatent autour d\u2019un fourneau, \u00e0 Beauregard ils savourent un beau panorama, au Plant\u00e9 le taureau s\u2019arr\u00eate un bon moment (en francoproven\u00e7al, \u00ab applant\u00e9 \u00bb signifie s\u2019arr\u00eater) et ainsi de suite (6). Mais il y a aussi des cas, tr\u00e8s fr\u00e9quents, o\u00f9 il n\u2019y a aucune relation phon\u00e9tique entre le r\u00e9cit et le toponyme, aucun lien direct et \u00e9vident. Pourquoi dit-on que rien que tel grand trou de Verrayes est habit\u00e9 par une f\u00e9e m\u00e9chante (la borna de la faye) quand, dans la zone, les cavernes sont nombreuses ? (7) Pourquoi on imagine un village disparu au fond du lac de Villaz, \u00e0 Challant-Saint-Victor, et non pas au fond de nombreux autres lacs alpins de la vall\u00e9e ? (8) Pourquoi trouvons- nous \u00e0 Pontey une pierrier habit\u00e9e par le diable (cllap\u00e8i djablo\u00f9) ? (9) Pourquoi le chalet du Vouargnou \u00e0 Gaby est-il hant\u00e9 par les revenants et non pas les autres de la m\u00eame paroisse ? (10) Pourquoi raconte-t-on que Calvin, dans sa fuite l\u00e9gendaire de la ville d\u2019Aoste s\u2019est arr\u00eat\u00e9 dans la ferme de Bibian et non pas dans une autre ? (11) Est-ce \u00e0 cause d\u2019une particularit\u00e9 morphologique du lieu ? De sa position ? De son micro-climat ? Est-ce l\u2019\u00e9pave d\u2019une anecdote oubli\u00e9e que nous ne conna\u00eetrons jamais ? Ou est-ce tout simplement le hasard de l\u2019imagination populaire qui associe un lieu et un toponyme \u00e0 un r\u00e9cit fantastique ou \u00e0 des souvenirs historiques mythifi\u00e9s ?<\/p>\n

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Etant donn\u00e9 l\u2019abondance des mat\u00e9riaux et le temps limit\u00e9 \u00e0 ma disposition, je me bornerai \u00e0 glaner par-ci, par-l\u00e0, dans mon corpus. D\u2019abord, il est int\u00e9ressant de constater comment la toponymie conserve le souvenir du passage de personnages fameux, imaginaires ou historiques.<\/p>\n

Etonnamment, il n\u2019y a pas beaucoup de traces de \u00ab  nos anc\u00eatres les Celtes \u00bb, les Salasses dans notre cas. Par contre on se rappelle bien du Juif Errant qui s\u2019est arr\u00eat\u00e9 \u00e0 Ayas, dans une grotte qui porte son nom (12) et pr\u00e8s d\u2019une petite cascade d\u2019eau fra\u00eeche, \u00ab L\u2019\u00e9va di Tonin \u00bb (l\u2019eau du petit Antoine) dont il a bu d\u2019un coup toute l\u2019eau . Au Breuil, \u00e0 2000 m\u00e8tres d\u2019altitude, au pied du Cervin, il est pass\u00e9 deux fois. La premi\u00e8re fois, quand le pic du Cervin n\u2019existait pas encore, il trouva un village prosp\u00e8re o\u00f9 poussaient m\u00eame les arbres \u00e0 fruits et il fut tr\u00e8s bien accueilli par la population. La seconde fois, mil ans apr\u00e8s, il trouva un grand pic mena\u00e7ant, une nature hostile et un climat rude. D\u00e9\u00e7u, il se mit \u00e0 pleurer et de ses larmes se forma un petit lac : le lac Bleu (13).<\/p>\n

Vers l\u2019an mille, c\u2019est le tour des Sarrasins. L\u2019histoire, en v\u00e9rit\u00e9, n\u2019atteste pas leur pr\u00e9sence en Vall\u00e9e d\u2019Aoste. Mais elle ne l\u2019exclut pas non plus. Leur souvenir est encore vivant dans l\u2019imaginaire collectif : une dame de Challand-Saint-Anselme nous assure qu\u2019ils \u00ab \u00e9taient des petits hommes avec le comportement d\u2019animaux sauvages. Ils travaillaient jour et nuit. A fin de percer les rochers, ils utilisaient des acides qui les br\u00fblaient\u2026 \u00bb. Cependant, le m\u00eame t\u00e9moin nous dit aussi qu\u2019ils faisaient leurs emplettes chez une veuve du village d\u2019Arbaz, surnomm\u00e9e la Gazetta, et qu\u2019ils payaient r\u00e9guli\u00e8rement l\u2019addition\u2026(14) Leurs enfants \u00e9taient bruns, mais, para\u00eet-il, ils ch\u00e9rissaient les blonds qu\u2019ils volaient aux Chr\u00e9tiens (15) La toponymie leur attribue de grands trous pour se cacher \u00e0 Pont-Boset (La Borma di Saraz\u00e9n\/Le Trou des Sarrasins) et \u00e0 Ayas (Le Tchamp D\u00e8rr\u00e9\/Le Champ de Derri\u00e8re), une grotte \u00e0 Bard (La Barma di Saraz\u00e9n\/La Grotte des Sarrasins), un rocher \u00e0 Issogne (Lo B\u00e8rio Sarah\u00ecn\/Le rocher Sarrasin), \u00e0 Ch\u00e2tillon des vignes (L\u00e9 Saraz\u00e9n\/Les Sarrasins), \u00e0 Verrayes des maisons d\u00e9labr\u00e9es et abandonn\u00e9es (L\u00e8 Saraz\u00e9n\/Les Sarrasins), \u00e0 Vi\u00e8yes, hameau d\u2019Aymavilles, des champs de c\u00e9r\u00e9ales (Sarazina\/Sarrasine). Aoste m\u00eame fut conquise, d\u00e9truite et reb\u00e2tie par les Sarrasins. Ils en firent un immense ch\u00e2teau \u00e0 trois \u00e9tages, occupant toute l\u2019enceinte de l\u2019ancienne cit\u00e9, dont le sous-sol \u00e9tait r\u00e9serv\u00e9 aux esclaves chr\u00e9tiens. Elle sera reconquise par une arm\u00e9e multinationale venant de France, une sorte de croisade. Apr\u00e8s un long si\u00e8ge, sept ans, les chr\u00e9tiens eurent l\u2019id\u00e9e qui leur permit d\u2019atteindre le but : d\u00e9vier l\u2019eau du torrent Buthier et le canaliser vers la ville. Mais ce ne fut pas pour tout de suite : pendant longtemps les Sarrasins d\u00e9vers\u00e8rent au Sud l\u2019eau venant du Nord. Et pour s\u2019encourager dans ce travail, chacun disait \u00e0 son compagnon, en bon fran\u00e7ais de l\u2019\u00e9poque, \u00ab Oste l\u2019eau ! Oste l\u2019eau \u00bb. D\u2019o\u00f9 le nom d\u2019Aoste (16) ! Les derniers Sarrasins seront chass\u00e9s du Mont-Joux par Saint Bernard dont le col prendra le nom. Entre temps, le seigneur de Ch\u00e2telard de La Salle, pour conqu\u00e9rir le c\u0153ur de sa belle, fille des Seigneurs de Gressan, pr\u00eata son bras arm\u00e9 au futur beau-p\u00e8re pour le lib\u00e9rer des incursions des Sarrasins qui descendaient du col du Drink, entre Cogne et la vall\u00e9e centrale. A la t\u00eate des Sarrasin il y avait un guerrier gigantesque appel\u00e9 Gargantua\u2026<\/p>\n

Donc, Gargantua aussi a laiss\u00e9 des traces dans la toponymie. Gressan, \u00e0 la banlieue sud d\u2019Aoste conserve le grand orteil du g\u00e9ant : La Couta de Gargantua (la c\u00f4te de Gargantua) (17). Il s\u2019agit d\u2019une grande moraine r\u00e9siduelle, t\u00e9moin d\u2019anciens glaciers, en partie bois\u00e9e et en partie recouverte de vignobles. On raconte aussi qu\u2019un jour, Gargantua, roi des g\u00e9ants se rendit avec sa cour \u00e0 Valtournenche pour un bon repas. A l\u2019\u00e9poque, les montagnes qui s\u00e9paraient le Valtounenche de Zermatt \u00e9taient une sorte de haute barri\u00e8re uniforme sans accidents notables. A la fin du repas, un peu ivre, Gargantua voulut aller voir ce qu\u2019il y avait de l\u2019autre c\u00f4t\u00e9 de la cha\u00eene. Arriv\u00e9 au sommet, il \u00e9carta ses jambes pour mieux admirer le paysage. Mais son poids le fit enfoncer et d\u00e9clencha des grands \u00e9boulements. Ce fut ainsi qu\u2019il cr\u00e9a le Cervin, qui plongera, comme nous l\u2019avons dit, le Juif Errant dans le d\u00e9sespoir (18).<\/p>\n

Un autre voyageur illustre dont le souvenir est particuli\u00e8rement pr\u00e9sent dans la toponymie est Napol\u00e9on Bonaparte. Son passage par le col du Grand-Saint-Bernard en 1800 est une donn\u00e9e historique incontestable mais dans la toponymie, en Vall\u00e9e d\u2019Aoste il a laiss\u00e9 des traces, plus contestables, m\u00eame o\u00f9 il n\u2019est jamais pass\u00e9, signe, peut-\u00eatre, de sa grande puissance\u2026 A Saint-Rhemy-en-Bosses il y a \u00ab Lo Noueusse (terrain fra\u00eechement d\u00e9frich\u00e9) de Napolion \u00bb, \u00e0 Ollomont il s\u2019est arr\u00eat\u00e9 aux \u00ab Baraque de Napolion \u00bb, \u00e0 Saint-Vincent il s\u2019est arr\u00eat\u00e9 dans le petit hameau de Lotoz, \u00e0 Brusson il a bu \u00e0 la fontaine de Napol\u00e9on , \u00e0 Ayas il a emprunt\u00e9 \u00ab a tcharr\u00e9ra (sentier) de Napoleon \u00bb et a camp\u00e9 \u00e0 Cortejella ainsi qu\u2019\u00e0 Champorcher au lieu-dit \u00ab Lou pro d\u00e8 Dound\u00e8ina \u00bb (Le pr\u00e9 de Dond\u00e9naz). Quelque part il a laiss\u00e9 des traces encore bien visibles : une croix grav\u00e9e dans un rocher d\u2019Avise, \u00e0 \u00ab L\u00e9 Porte \u00bb (Les Portes) et \u00e0 \u00ab L\u00e9 P\u00e9re Biantse \u00bb (les pierres blanches) \u00e0 Saint-Vincent, l\u2019empreinte d\u2019une de ses bottes est toujours grav\u00e9e dans un rocher (19). Ce dernier d\u00e9tail est tr\u00e8s recourant dans le l\u00e9gendaire alpin : le sanctuaire d\u2019Oropa, pr\u00e8s de Bielle, a \u00e9t\u00e9 b\u00e2ti sur un rocher o\u00f9 saint Eus\u00e8be de Verceil avait laiss\u00e9 les traces de ses genoux et le corps de saint Besse, tu\u00e9 par des bergers, quand il fut retrouv\u00e9 par des habitants de Cogne, avait creus\u00e9 un trou de sa forme dans le rocher (20). Au Pian de Lu (Le Plateau du Loup), \u00e0 Donnas, Napol\u00e9on nous a laiss\u00e9 des fortifications ainsi qu\u2019\u00e0 \u00ab La Comba N\u00e9e \u00bb (La Combe Noire), \u00e0 Saint-Nicolas, o\u00f9, para\u00eet-il, un soldat juif a \u00e9t\u00e9 enseveli. A Brusson il a combattu au \u00ab Lai da Bataya \u00bb (Lac de la battaille) et, \u00e0 Morgex, au lieu dit \u00ab Le Grande Vie \u00bb il a perdu plusieurs soldats morts d\u2019une \u00e9pid\u00e9mie non pr\u00e9cis\u00e9e. A ce qu\u2019il para\u00eet, lors de l\u2019enterrement, profond\u00e9ment \u00e9mu, le g\u00e9n\u00e9ral a exclam\u00e9 : \u00ab Quelles grandes vies ! \u00bb D\u2019o\u00f9 le toponyme\u2026<\/p>\n

A Perloz il y a \u00ab La Barma (grotte) de Coy \u00bb o\u00f9 la population s\u2019est cach\u00e9e pour fuir l\u2019arm\u00e9e napol\u00e9onienne et \u00e0 Ayas \u00ab La Barma dou Pr\u00e9re \u00bb o\u00f9 s\u2019est r\u00e9fugi\u00e9 un pr\u00eatre (21)<\/p>\n

A Vens, \u00e0 Saint Nicolas, le passage des troupes a \u00e9t\u00e9 beaucoup moins traumatisant : en ex\u00e9cution d\u2019un ordre de Napol\u00e9on, des soldats ont donn\u00e9 un coup de main pour transporter une grande poutre en m\u00e9l\u00e8ze pour le toit d\u2019une \u00e9table. A la fin les villageois ont bu \u00e0 la ronde, sur la place du village, avec le g\u00e9n\u00e9ral et ses soldats. Toujours \u00e0 Saint-Nicolas, au lieu-dit \u00ab Sarioude \u00bb, Napol\u00e9on a gagn\u00e9 l\u2019admiration d\u2019un paysan lui prenant sa faux et en fauchant correctement un demi andain\u2026 (22)<\/p>\n

L\u2019\u00e9pop\u00e9e napol\u00e9onienne n\u2019est pas la derni\u00e8re \u00e0 avoir laiss\u00e9 des traces dans la toponymie. C\u2019est la R\u00e9sistance le dernier grand \u00e9v\u00e9nement qui a marqu\u00e9 la m\u00e9moire collective et qui a laiss\u00e9 de nombreuses traces de r\u00e9cits li\u00e9s \u00e0 la toponymie. Avec le temps l\u2019histoire devient l\u00e9gende. Mais cela m\u00e9riterait un rapport \u00e0 part.<\/p>\n

Les \u00e9pid\u00e9mies et les catastrophes naturelles aussi sont souvent rappel\u00e9es dans la toponymie. Le souvenir de la peste de 1630 est pr\u00e9sent un peu dans toutes les paroisses, avec l\u2019exception de celles au dessus de 1500 m\u00e8tres, souvent \u00e9pargn\u00e9es par le fl\u00e9au. On trouve des cimeti\u00e8res, des grottes o\u00f9 les gens se sont r\u00e9fugi\u00e9s pour \u00e9viter le contage, des oratoires et aussi des pr\u00e9s qui indiquent la limite jusqu\u2019o\u00f9 la maladie s\u2019est manifest\u00e9e. Le chol\u00e9ra de la fin du XIX\u00b0 est rappel\u00e9, mais beaucoup moins que la peste. (23) Les \u00e9boulements, les inondations, les grandes avalanches sont, bien entendu, une source d\u2019inspiration importante. G\u00e9n\u00e9ralement, ces \u00e9v\u00e9nements tragiques sont expliqu\u00e9s par un r\u00e9cit aux mille variables tr\u00e8s r\u00e9pandu dans toutes les Alpes : une communaut\u00e9 qui a refus\u00e9 la charit\u00e9 \u00e0 un pauvre est punie avec la destruction.<\/p>\n

Mais c\u2019est l\u2019eau et surtout les rus, les canaux d\u2019irrigation, qu\u2019en Valais on appelle les bisses, qui ont particuli\u00e8rement sollicit\u00e9 l\u2019imagination des Vald\u00f4tains.<\/p>\n

En Vall\u00e9e d\u2019Aoste il pleut tr\u00e8s peu. Pays intramontain, prot\u00e9g\u00e9e de tous c\u00f4t\u00e9s par des montagnes qui d\u00e9passent les 4.000 m\u00e8tres, la Vall\u00e9e, dans son sillon central, la partie la plus habit\u00e9e, b\u00e9n\u00e9ficie de moins de 600 millim\u00e8tres de pr\u00e9cipitations par an. Dispos\u00e9e suivant un axe de est \u00e0 ouest, son versant expos\u00e9 au sud, naturellement aride, serait inutilisable \u00e0 des fins agricoles s\u2019il n\u2019\u00e9tait sillonn\u00e9 par un r\u00e9seau de rus qui puisent, souvent, au pied des glaciers et parcourent des dizaines de kilom\u00e8tres \u00e0 travers des pierriers, des for\u00eats, des vallons escarp\u00e9s, m\u00eame des cols. Ces rus, les premiers b\u00e2tis \u00e0 la fin du XIII\u00b0, propri\u00e9t\u00e9 commune, sont encore en fonction maintenant et l\u2019utilisation de leur eau est encore soumise \u00e0 une r\u00e9glementation rigide et d\u00e9taill\u00e9e (24). Pour plusieurs d\u2019entre eux, nous conservons la documentation qui en est \u00e0 l\u2019origine. Malgr\u00e9 cela, les gens tendent \u00e0 attribuer leur construction aux Sarrasins. Mais si les Sarrasins sont les b\u00e2tisseurs, les serpents en sont les divinit\u00e9s tut\u00e9laires. On raconte qu\u2019\u00e0 Thuy, hameau de Chambave, un jour un ouvrier charg\u00e9 de l\u2019entretien du ru de \u00ab Cherva \u00bb, tua un serpent qui se r\u00e9v\u00e9la \u00eatre une charmante jeune-femme. Depuis l\u2019eau cessa de couler dans le ru et il a fallu de nombreuses messes de suffrage pour l\u2019\u00e2me de la jeune morte pour que l\u2019eau revienne (25). Le th\u00e8me de la f\u00e9e-serpent est courant, surtout dans la vall\u00e9e du Lys et ne concerne pas seulement les rus mais aussi les lacs, les torrents et les sources. Syst\u00e9matiquement, quand le serpent est tu\u00e9, il r\u00e9v\u00e8le sa v\u00e9ritable nature et l\u2019eau tarit (26).<\/p>\n

En Vall\u00e9e d\u2019Aoste, il y a une dizaine de canaux qu\u2019on appelle \u00ab Ru dou pan perdu \u00bb (ru du pain perdu). Il s\u2019agit de canaux qui ont \u00e9t\u00e9 abandonn\u00e9s, probablement au temps de la peste (1630) quand la population d\u00e9cim\u00e9e n\u2019a pas pu assurer les corv\u00e9es n\u00e9cessaires pour l\u2019entretien ou, quelques uns au moins, qui ne sont jamais entr\u00e9s en fonction probablement \u00e0 cause de quelques erreurs dans le projet.<\/p>\n

Si le mot \u00ab pan \u00bb signifie effectivement pain et ce n\u2019est pas un homophone dont le sens ne s\u2019est perdu, ils tireraient leur nom du fait que leur non utilisation a signifi\u00e9 une perte \u00e9conomique pour le travail qu\u2019ils ont requis et pour le manque des b\u00e9n\u00e9fices pr\u00e9vus. L\u2019un de ces rus aurait du porter l\u2019eau dans la colline assoiff\u00e9e de Saint-Vincent puisant son eau du Marmore, le torrent qui draine le Valtournenche. On raconte qu\u2019un jour, le garde du ru, la personne pr\u00e9pos\u00e9e \u00e0 son contr\u00f4le, tua un serpent. Soudain, une crevasse s\u2019ouvrit dans son fond et le pauvre homme n\u2019arriva pas \u00e0 la boucher, malgr\u00e9 tous ses efforts. Pris par le d\u00e9sespoir, il se laissa glisser dans le trou et mourut. Depuis le ru ne fut plus \u00ab charg\u00e9 \u00bb, c\u2019est \u00e0 dire rempli. Aux Combes, hameau de la commune d\u2019Introd, o\u00f9 depuis des ann\u00e9es Jean-Paul II passe ses vacances d\u2019\u00e9t\u00e9, il y a aussi un Ru de Pan Perdu. On dit que pendant sept ans, sept gardes du rus sont partis au printemps contr\u00f4ler la prise d\u2019eau dans le Valgrisenche et ne sont jamais revenus. Ainsi, il a \u00e9t\u00e9 abandonn\u00e9. A La Magdelaine, commune du Valtournenche, les habitants utilisaient l\u2019eau d\u2019un torrent, actuellement presque sec appel\u00e9 \u00ab Lo val\u00f2i de la Bosse \u00bb (le torrent du tonneau). Il para\u00eet qu\u2019un dragon volant avec une boule d\u2019or dans sa bouche r\u00f4dait dans ces coins. Un jour, un paysan en train d\u2019irriguer ses pr\u00e9s vit que le dragon, apr\u00e8s avoir d\u00e9pos\u00e9 sa boule dans l\u2019herbe, se baignait dans l\u2019eau du ru. Il s\u2019empara de la boule mais voyant arriver le dragon, il se cacha dans un tonneau. Le dragon le vit et pour r\u00e9cup\u00e9rer sa boule se mit \u00e0 battre de sa queue le tonneau jusqu\u2019\u00e0 ce qu\u2019il le fit tomber dans un ravin. Il r\u00e9cup\u00e9ra sa boule et nous ne savons pas ce qui est arriv\u00e9 au paysan. Mais le nom de la \u00ab bosse \u00bb est rest\u00e9 au torrent. Le Ru de Gagnou, \u00e0 Saint-Vincent, tire son nom d\u2019une histoire qui revient souvent, donc banale pour sa quotidiennet\u00e9 : les deux fr\u00e8res qui l\u2019avaient construit, se disput\u00e8rent pour son utilisation et arriv\u00e8rent jusqu\u2019au tribunal o\u00f9, \u00e9videmment, l\u2019un des deux gagna la cause. Il faut savoir qu\u2019en Vall\u00e9e d\u2019Aoste il y a eu des proc\u00e8s qui ont dur\u00e9 des d\u00e9cennies, presque un si\u00e8cle, pour d\u00e9finir le droit \u00e0 l\u2019eau et que des familles du m\u00eame village ne se sont plus adress\u00e9 la parole pendant des g\u00e9n\u00e9rations a cause d\u2019un vol d\u2019eau.<\/p>\n

Mais il y a aussi des communaut\u00e9s qui ont trop d\u2019eau : c\u2019est le cas de Donnas, dans la Basse-Vall\u00e9e, sur les bords de la Doire, o\u00f9 la rivi\u00e8re malheureusement d\u00e9borde souvent. Un habitant de Donnas regardait de chez lui la c\u00f4te ensoleill\u00e9e, \u00e0 l\u2019\u00e9poque inhabit\u00e9e, sise derri\u00e8re le petit bourg de Pont-Saint-Martin.<\/p>\n

\u00ab L\u00e0 haut – pensait-il \u2013 il n\u2019y a certainement pas le probl\u00e8me de toute cette eau qui d\u00e9borde et rend st\u00e9riles mes champs \u00bb Et conclut, en francoproven\u00e7al : \u00ab All\u00e8n y v\u00e9re \u00bb (Allons voir). Ainsi, le hameau qu\u2019il fonda prit le nom d\u2019Yv\u00e9ry \u2026(27)<\/p>\n

NOTES<\/p>\n

(1) Favre Saverio, Toponomastica<\/em>, in La terra dei Challant<\/em>, Aoste, 1999.<\/p>\n

(2) Perron Marco, Enqu\u00eate toponymique en Vall\u00e9e d\u2019Aoste<\/em>, in La recherche toponymique dans les Alpes Occidentales<\/em>, Aoste, 1992 ; B\u00e9temps Alexis, La toponymie entre l\u2019oral et l\u2019\u00e9crit<\/em>, in “Le Monde Alpin et Rhodanien” N. 2-4, Grenoble, 1997 ; Favre Saverio et Cuneaz Ivana, Dix ans de toponymie<\/em>, in “Bulletin du Centre d\u2019Etudes Francoproven\u00e7ales” N.36, Aoste, 1993.<\/p>\n

(3) Cerutti A.V.,Borney P., Ceriano I, Saint-Pierre<\/em>, Aoste, 1993.                              <\/p>\n

(4) Christillin Jean-Jacques, L\u00e9gendes et r\u00e9cits recueillis sur les bords du Lys<\/em>, Aoste, 1901.<\/p>\n

(5) Enqu\u00eate toponymique vald\u00f4taine (in\u00e9dite), Bureau R\u00e9gional pour l\u2019Ethnologie et la linguistique (BREL), Aoste.<\/p>\n

(6) B\u00e9thaz Perside (t\u00e9moignage oral de) par B\u00e9temps Alexis, BREL, 1984.<\/p>\n

(7) Tibaldi Tancr\u00e8de, La borna de la Faye<\/em>, in Veill\u00e9es vald\u00f4taines<\/em>, Turin, 1911.<\/p>\n

(8) Voulaz Jean (t\u00e9moignage de) par B\u00e9temps Alexis, Archives priv\u00e9es, 1969.<\/p>\n

(9) Tillier (t\u00e9moignage de ) par Alexis B\u00e9temps, Pontey, 1969.<\/p>\n

(10) Voir note N.4.<\/p>\n

(11) Henry Joseph-Marie, Histoire de la Vall\u00e9e d\u2019Aoste<\/em>, Aoste, 1929.<\/p>\n

(12) Voir note N.1.<\/p>\n

(13) Chanu Gatto Tersilla, Il fiore del leggendario valdostano<\/em>, Turin, 1988.<\/p>\n

(14) Pasquettaz Odyle, interview de Jean Voulaz, 1983, cassette N.973, fonds AVAS.<\/p>\n

(15) Rivolin Angeline, interview de Favre Edith, 1984, cassette N.1388, fond AVAS.<\/p>\n

(16) Favre Joseph-Sim\u00e9on, Aoste Sarasine<\/em>, in “Le Mont-Blanc” N.16 et 17, Aoste, 1923.<\/p>\n

(17) Voir note N.13.<\/p>\n

(18) Voir note 5.<\/p>\n

(19) Voir note 5<\/p>\n

(20) Hertz Robert, Saint-Besse, \u00e9tude d\u2019un culte alpestre<\/em>, in M\u00e9langes de sociologie et folklore (par les soins de Marcel Mauss), Paris, 1928.<\/p>\n

(21) Voir note N.5.<\/p>\n

(22) Champr\u00e9tavy Rosito et Lagnier Emanuela, Les<\/em> chansons de Napol\u00e9on<\/em>, Aoste, 1986.<\/p>\n

(23) Voir note N.4 et 14.<\/p>\n

(24) Gerbore Ezio Emeric, Le d\u00e9veloppement des rus au Val d\u2019Aoste<\/em>, in L\u2019eau et les rus<\/em>, Concours Cerlogne, Aoste, 2000.<\/p>\n

(25) Archives B\u00e9temps.<\/p>\n

(26) Boccazzi-Varotto Attilio, I racconti della stalla<\/em>, Ivr\u00e9e (Turin), 1975.<\/p>\n

(27) Champr\u00e9tavy Rosito, L\u2019eau et les rus<\/em>, Concours Cerlogne, Aoste, 2001.<\/p>\n

ANNEXES<\/strong><\/p>\n

Note N.6<\/strong><\/p>\n

Ce t\u00e9moignage de Novembre 1996 a \u00e9t\u00e9 r\u00e9dig\u00e9 par Alexis B\u00e9temps pour Hubert Bessat qui \u00e9tait en train de pr\u00e9parer un article sur les relations \u00e0 travers les cols alpins et, plus en particulier , sur les Messes lointaines. Ce r\u00e9cit n\u2019\u00e9tait qu\u2019un compl\u00e9ment \u00e0 un autre o\u00f9 il \u00e9tait question des Valgriseins qui, d\u2019apr\u00e8s la tradition, avant d\u2019avoir leur \u00e9glise paroissiale, le dimanche, montaient au Col du Mont et regardaient vers Le Miroir, hameau de Sainte-Foy-en-Tarentaise, o\u00f9 les fid\u00e8les, au moment de l\u2019\u00e9l\u00e9vation de l\u2019hostie, hissaient un drapeau sur la pointe du clocher pour que les Valgriseins sachent quand s\u2019agenouiller. <\/em><\/strong><\/p>\n

Lo Bou di savoyar(Le taureau des Savoyards)<\/em><\/strong><\/p>\n

Voici le r\u00e9cit du bou di savoyar<\/em> tel que je me le rappelle. Je crains \u00eatre parmi les derniers \u00e0 conna\u00eetre ce r\u00e9cit que ma tante Perside B\u00e9thaz, d\u00e9c\u00e9d\u00e9e, me racontait souvent. Ma m\u00e8re, que j’ai interrog\u00e9e, conna\u00eet moins de d\u00e9tails que moi !<\/p>\n

Un jour o\u00f9 les vaches \u00e9taient au p\u00e2turage dans l’alpage de la Motte, au dessus de Sainte-Foy-en Tarentaise, un taureau s’\u00e9chappa du troupeau en prenant la direction du Col du Mont. (Je n’ai jamais trouv\u00e9 normal qu’un taureau paisse avec les vaches : il s’agissait probablement d’un jeune taurillon d’un an\u2026) Deux bergers partent \u00e0 sa poursuite mais le taureau est loin. Du haut du col, ils l’aper\u00e7oivent, ils acc\u00e9l\u00e8rent alors leur marche mais il reste toujours bien loin devant eux. De temps en temps, le taureau s’arr\u00eate mais juste avant que les deux bergers s’approchent de lui, il reprend son chemin.<\/p>\n

Il s’arr\u00eate d’abord \u00e0 Seri\u00e9i<\/em> (Surrier), en bas du col, et quand les deux bergers arrivent, une bise froide venant du col se fait sentir : \u00abLe froid est s\u00e9rieux<\/strong>\u00bb, constatent-ils. Le taureau tourne \u00e0 gauche et descend la vall\u00e9e; il s’arr\u00eate \u00e0 i Jol\u00e9ye<\/em> (Les Usuli\u00e8res). Arriv\u00e9s sur les lieux, les bergers jettent un coup d’\u0153il sur la vall\u00e9e pour en conclure qu’elle est bien jolie<\/strong>. La halte successive est au Tsap\u00ec<\/em> (Chapuis) o\u00f9 les bergers se mettent un chapeau<\/strong>. Finalement, les bergers arrivent \u00e0 Fornet, le village principal de la tierce d’en haut de Valgrisenche, o\u00f9 ils s’assoient autour d’un beau fourneau<\/strong>. Puis ils perdent de vue le taureau jusqu’au Sev\u00e8i<\/em> (Sevey) o\u00f9 les bergers s’\u00e9crient : \u00abSe v\u00e8i, se v\u00e8i<\/em>\u00bb (on le voit, on le voit).<\/p>\n

Ils arrivent enfin \u00e0 Borgar<\/em> (Beauregard) o\u00f9 le panorama est magnifique. Au Plant\u00e9<\/em> (Plant\u00e9) le taureau s’arr\u00eate, (le verbe s’applant\u00e9<\/em> en patois signifie s’arr\u00eater), mais il reprend son chemin et les deux bergers revoient la b\u00eate \u00e0 la B\u00e9ta<\/em> (La B\u00e9thaz) et s’\u00e9crient : \u00abLa b\u00eate, la b\u00eate<\/em> !\u00bb. Fatigu\u00e9s, ils font une pause \u00e0 Ser\u00e9<\/em> (Cer\u00e9) et un habitant leur offre un bout de s\u00e9ras<\/em>.<\/p>\n

 Une fois repartis, ils voient le taureau dans un beau pr\u00e9 rond<\/strong>, Pray\u00f3n (Prariond). Mais le taureau, bien que fatigu\u00e9, repart et, ou Rev\u00e9isse<\/em> (Le Revers), il se met \u00e0 la renverse<\/em>, crev\u00e9 de fatigue. Il se reprend encore pour arriver jusqu’\u00e0 la R\u00e9issa o\u00f9 il s’arr\u00eate [1]<\/span><\/a>d\u00e9finitivement. Les bergers r\u00e9cup\u00e8rent leur taureau et, avant de rebrousser chemin, ils s’arr\u00eatent admirer la vall\u00e9e plaine, Plav\u00e1<\/em> (Planaval).<\/p>\n

[1] Ce village de la commune d’Arvier, mais faisant partie de la paroisse de Valgrisenche, est compos\u00e9 d’une seule maison d\u00e9sormais en ruine. Il \u00e9tait consid\u00e9r\u00e9 comme \u00e9tant le dernier village de Valgrisenche, pas le premier ! Dans l’histoire, son nom d\u00e9riverait du verbe arr\u00eater, ar\u00e8iss\u00e9<\/em> dans le patois de Valgrisenche o\u00f9 le groupe latin st<\/em> devient ss<\/em>. Le toponyme r\u00e9issa<\/em> me fait d’abord penser \u00e0 une scierie, r\u00e9issa<\/em> en patois. Un torrent descend pas loin mais il s’agit d’un couloir d’avalanche et ce n’est pas par hasard que la maison a \u00e9t\u00e9 d\u00e9molie en 1972 par une avalanche. Il est, \u00e0 mon avis, possible que le nom soit li\u00e9 \u00e0 cette herbe des mar\u00e9cages pr\u00e9sente autour du village qu’on appelle rissa<\/em> \u00e0 Valgrisenche et rita<\/em> ou rihta<\/em> dans d’autres patois, fromental ou ferrasse en fran\u00e7ais (Arrhenaterum elatius<\/em>).<\/p>\n

                                                                                           Alexis B\u00e9temps<\/em><\/p>\n

Echantillon de r\u00e9cits tir\u00e9s de l\u2019Enqu\u00eate toponymique vald\u00f4taine : <\/strong>Tchamp-D\u00e8rr\u00e9 \u00ab C\u2019est un endroit raide o\u00f9 il y avait des champs de seigle, d\u2019avoine, d\u2019orge, de f\u00e8ves et de pommes de terre. On r\u00e9coltait m\u00eame quelques navets. A nos jours, il y a des p\u00e2turages. On raconte qu\u2019\u00e0 cet endroit il y avait une barme o\u00f9 les Sarasin se cachaient. Si quelqu\u2019un les chassait, ils trouvaient une issue et personne ne savait o\u00f9 ils aboutissaient \u00bb.<\/em><\/p>\n

Ayas, t\u00e9moignage de Chasseur Marino par Cristina Merlet, 10.31.1988.<\/em><\/p>\n

Note N.17<\/em><\/strong><\/p>\n

La Gran-Couta \u00ab Il s\u2019agit de la moraine imposante et de singuli\u00e8re beaut\u00e9 qui caract\u00e9rise le paysage de Gressan et qui de Binaz s\u2019\u00e9tend jusqu\u2019\u00e0 Clapey. Elle a une surface aride avec peu de v\u00e9g\u00e9tation parce qu\u2019elle est constitu\u00e9e de terrain sablonneux. La l\u00e9gende raconte qu\u2019en dessous de la Couta est enseveli le doigt du g\u00e9ant Gargantua. Au sommet de la Couta, surgit une croix en bois en souvenir de la Mission de l\u2019ann\u00e9e 1938.<\/em><\/p>\n

Gressan, T\u00e9moignage de Quendoz Albino par Dabaz Nicoletta, 18.10.1997<\/em><\/p>\n

Note N.21<\/em><\/strong><\/p>\n

L\u00e9 Grande-Vie \u00ab Une l\u00e9gende raconte que quand Napol\u00e9on avait travers\u00e9 les Alpes, \u00e9tait pass\u00e9 par Mollier o\u00f9 une terrible \u00e9pid\u00e9mie moissonna ses troupes. Les corps des soldats furent ensevelis l\u00e0, dans un pr\u00e9, sous les yeux de l\u2019Empereur qui disait : \u00ab Oh les grandes vies, les grandes vies qui sont parties ! \u00bb<\/em><\/p>\n

Morgex, t\u00e9moignage de Ch\u00e2tel Eleonora par Ch\u00e2tel Cristina, 20.04.1990<\/em><\/p>\n

 <\/em>Note N.21<\/em><\/strong><\/p>\n

La Barma dou Pr\u00e9r\u00e8 \u00ab On raconte qu\u2019\u00e0 la fin du XVIII si\u00e8cle ou au d\u00e9but du XIX, les arm\u00e9es de Napol\u00e9on camp\u00e8rent en vall\u00e9e d\u2019Ayas, \u00e0 Cun\u00e9az. Et vu que les pr\u00eatres \u00e9taient chass\u00e9s par les troupes napol\u00e9oniennes, l\u2019un d\u2019entre eux se cacha \u00e0 cet endroit. \u00bb<\/em><\/p>\n

Ayas, t\u00e9moignage de Favre Remo par Merlet Cristina, 07.05.1988<\/em><\/p>\n

Note N.19<\/em><\/strong><\/p>\n

Le Porte \u00ab En direction de ce toponyme, sur le chemin de l\u2019Arche, il serait taill\u00e9 dans la roche le symbole du passage de Napol\u00e9on par l\u2019ancienne route des Salasses, c\u2019est \u00e0 dire la cro\u00e9 de Napolion, comme l\u2019appellent les habitants. \u00bb<\/em><\/p>\n

Avise, T\u00e9moignage de Lombard Marcel par Domaine Lara, 19.10.1996.<\/em><\/p>\n

Note N.4<\/em><\/strong><\/p>\n

Le gouffre de Guillemore. <\/em>Tir\u00e9 de L\u00e9gendes et r\u00e9cits recueillis sur les bords du Lys <\/em>de Jean-Jacques Christillin, Aoste, 1901.<\/p>\n

\u2026Au bord de l\u2019ab\u00eeme et sur la croupe rocheuse qui domine l\u2019entr\u00e9e du pont, existait autrefois, dit-on, une mauvaise auberge tenue par un couple \u00e9tranger au Pays. L\u2019aubergiste et sa femme \u00e9taient dignes l\u2019un de l\u2019autre, et leur maison sinistre \u00e9tait un objet de terreur pour les habitants de la vall\u00e9e. Le ma\u00eetre de ce lieu malfam\u00e9 s\u2019appelait Guillaume et son nom seul faisait trembler d\u2019effroi. C\u2019\u00e9tait un d\u00e9mon dans le corps d\u2019un g\u00e9ant. Pendant longtemps il put exercer impun\u00e9ment le brigandage et le vol, gr\u00e2ce \u00e0 sa force hercul\u00e9enne et son audace sans bornes. Malheur aux pauvres voyageurs qui passaient \u00e0 sa port\u00e9e ou qui r\u00e9clamaient de lui quelques secours. Ils \u00e9taient d\u00e9pouill\u00e9s, assassin\u00e9s sans piti\u00e9 et jet\u00e9s ensuite dans le gouffre. <\/em>Le ciel permit enfin que le ch\u00e2timent atteignit cet homme dont l\u2019existence n\u2019\u00e9tait qu\u2019une sc\u00e8ne sanglante de crimes. Un soir, cinq hommes arm\u00e9s jusqu\u2019aux dents, entr\u00e8rent dans l\u2019auberge pour s\u2019emparer du g\u00e9ant, mais celui-ci, plut\u00f4t que de tomber dans les mains des ex\u00e9cuteurs de la justice, pr\u00e9f\u00e9ra se pr\u00e9cipiter d\u2019une fen\u00eatre dans le gouffre.<\/em><\/p>\n

Ce fut une bonne nouvelle pour les habitants de la vall\u00e9e, et, de Pont-Saint-Martin au Mont-Rose, il n\u2019y eut qu\u2019un cri de soulagement : \u00ab Guillaume est mort, Guillaume est mort ! \u00bb\u2026<\/em><\/p>\n

Note N.8<\/em><\/strong><\/p>\n

La l\u00e9gende du lac de Villaz<\/em><\/p>\n

O\u00f9 il y a de nos jours le lac de Villaz, il y avait autrefois un village florissant. Un peu plus en haut, sur la c\u00f4te, habitait une femme pauvre avec beaucoup d\u2019enfants. Un jour, J\u00e9sus Christ passa par l\u00e0 et fut d\u00e9\u00e7u par le manque de charit\u00e9 des habitants du village. Il frappa \u00e0 la porte de la pauvre femme qui s\u2019empressa de le faire entrer et le fit asseoir sur l\u2019unique chaise qu\u2019il y avait \u00e0 la maison. La femme avait une grande po\u00eale qu\u2019elle avait rempli de cailloux pour les faire cuire. Elle racontait aux enfants qu\u2019il s\u2019agissait de ch\u00e2taignes particuli\u00e8rement dures qui ne voulaient pas cuire\u2026Elle r\u00e9p\u00e9ta ce pieux mensonge jusqu\u2019\u00e0 ce que les enfants ne s\u2019endormirent. J\u00e9sus Christ, avant de se coucher, pr\u00e9vint la femme qu\u2019elle aurait entendue des bruits et lui recommanda de ne pas bouger. Le matin, quand la femme et les enfants se r\u00e9veill\u00e8rent, ils eurent la surprise de ne plus voir le village et, \u00e0 sa place, il y avait le lac. Les gens disent que, parfois, on peut encore voir l\u2019image d\u2019une femme qui berce un de ses enfants, refl\u00e9t\u00e9e dans l\u2019eau.<\/em><\/p>\n

Challand \u2013Saint-Victor, T\u00e9moignage de Jean Voulaz par Alexis B\u00e9temps, 1969<\/em> <\/em><\/p>\n

Note N. 9<\/em><\/strong><\/p>\n

Pr\u00e8s du nouveau cimeti\u00e8re de Pontey, on peut voir une esp\u00e8ce de colline au bout de laquelle on apercevait souvent, la nuit, des feux myst\u00e9rieux. La tradition nous dit qu\u2019il y a un tr\u00e9sor, gard\u00e9 par le diable, sous une grosse pierre. Tous ceux qui ont cherch\u00e9 de s\u2019emparer du tr\u00e9sor, ont perdu leur vie dans la tentative. Une nuit, le cur\u00e9 se porta sur les lieux d\u2019o\u00f9 jaillissaient les feux, avec de l\u2019eau b\u00e9nite, Il la jeta sur le feu sans arriver \u00e0 l\u2019\u00e9teindre. Il fait alors recours \u00e0 des tonneaux d\u2019eau b\u00e9nite que des fid\u00e8les avaient transport\u00e9s pr\u00e8s de la pierre. Le feu s\u2019\u00e9teignit. Le diable vaincu s\u2019agenouilla devant le cur\u00e9 et fit serment d\u2019ob\u00e9ir aux ordres du vainqueur. Le cur\u00e9 lui ordonna de se retirer dans une perri\u00e8re en haut, depuis appel\u00e9e \u00ab cllap\u00e8i djablo\u00f9 \u00bb, et d\u2019y creuser une galerie avec une petite cuill\u00e8re.<\/em><\/p>\n

Pontey, T\u00e9moignage de Tillier par Alexis B\u00e9temps, 1969<\/em><\/p>\n

Note N.25<\/em><\/strong><\/p>\n

A Thuy, village de Chambave, il y a un ru, le \u00ab ru de la Cherva \u00bb, qui servait pour arroser les pr\u00e9s des alentours. Une fois, pendant l\u2019\u00e9t\u00e9, le mur qui prot\u00e9geait le ru s\u2019\u00e9croula. Reconstruit par les habitants, il continua \u00e0 s\u2019effondrer au m\u00eame endroit, l\u2019\u00e9t\u00e9 suivant, pendant plusieurs ann\u00e9es. <\/em>Les ouvriers qui avaient fait le travail racont\u00e8rent alors qu\u2019ils avaient vu, \u00e0 chaque fois, une vip\u00e8re sortir des pierres du ru \u00e9croul\u00e9es. L\u2019ann\u00e9e suivante, ils tu\u00e8rent la vip\u00e8re qui, imm\u00e9diatement, se transforma en femme. Depuis lors, toutes les ann\u00e9es, les habitants de Thuy font c\u00e9l\u00e9brer une Messe. Ce jour l\u00e0, comme pour le jour de la f\u00eate patronnale, on distribue du pain et de la soupe aux pauvres.<\/em><\/p>\n

Chambave, T\u00e9moignage de Car Marinella par Alexis B\u00e9temps, 1969.<\/em> <\/em><\/p>\n

Note N.24<\/em><\/strong><\/p>\n

La peste s\u00e9vissait en Vall\u00e9e d\u2019aoste. Le cur\u00e9 de La Magdeleine, un soir, alla pour fermer la porte de l\u2019\u00e9glise. Il regarda \u00e0 l\u2019int\u00e9rieur et, \u00e0 sa grande surprise, il s\u2019aper\u00e7ut que la statue de la Sainte-Vierge- de-Tous -Pouvoirs avait disparu. Le jour apr\u00e8s, lors d\u2019une promenade, le cur\u00e9 vit quelque chose qui luisait sur un mur, le long du chemin qui porte au village. Il s\u2019approcha et vit la Sainte-Vierge disparue. Il la prend et la ram\u00e8ne \u00e0 l\u2019\u00e9glise. Mais le jour apr\u00e8s la Madone dispara\u00eet de nouveau et on la retrouve sur le m\u00eame mur. La paroisse de La Magdeleine fut ainsi \u00e9pargn\u00e9e par le fl\u00e9au de la peste qui ne franchit pas l\u2019endroit o\u00f9 la Sainte-Vierge s\u2019\u00e9tait d\u00e9plac\u00e9e. Reconnaissants, les Magdeleins b\u00e2tirent un oratoire \u00e0 cet endroit.<\/em><\/p>\n

La Magdeleine, T\u00e9moignage de Artaz par Alexis B\u00e9temps, 1969<\/em><\/p>\n

Note N. 22<\/em><\/strong><\/p>\n\n\n\n
LA POUTRE DE L’\u00c9TABLE<\/td>\n<\/tr>\n<\/tbody>\n<\/table>\n\n\n\n
M\u00e8 si qu\u00e8 quan l’an ref\u00e0 lo b\u00f2i de no eun Env\u00e9 <\/em>faill\u00e8 tr\u00e8in\u00e9 an groussa pi\u00eehe pe f\u00e9e eun bord\u00f3n pe tch\u00e0i su to lo sol\u00e0n y b\u00f2i et son all\u00f3 su eun Vertos\u00e0n avou\u00ec eun meulet (ad\u00f2n l’ay\u00f2on po pe ni de roul6 et ni de camion; faill\u00e8 tr\u00e8in\u00e9 su la t\u00e8ra avoui lo meulet…) le yie\u2011pe eunc\u00f2o de dzi \u00e0 \u00e8idj\u00e9 et… ou\u00e8 lo meulet pouch\u00e8 po tr\u00e8in\u00e9… Adon Napoli\u00f3n l’a vu h\u00e8n, l’ay\u00e9 se sold\u00e0 l\u00e9… L’a deu y sold\u00e0: \u00abApode vo\u00bb. Et le sold\u00e0 se san beutt6… an veunt\u00e8n\u2011a, le port\u00f2on to Gomme r\u00e8n et l’an tr\u00e8in\u00f3 bo h\u00e8n eun Env\u00e9 et… Apri quan son ih\u00f3 bo, bon, son reust\u00f3 eun mom\u00e0n l\u00e9 \u00e0 pr\u00e8dj\u00e9, et l’an plach\u00e0 le pi\u00eehe; (Vie\u2011 dza to preste) apr\u00ec son all\u00f3 quii b\u00e8e avou\u00ec eun quarteun d’\u00e9t\u00e8n (ad\u00f3n I’ay\u00f2on tcheu eun quarteun d’\u00e9t\u00e8n)… Ad\u00f3n son sort\u00ec l\u00e9 de fou\u2011a \u00e0 la plahe et l’an baill\u00e0 b\u00e8e \u00e0 tcheu. Et le yion pe eunc\u00f2o tcheu hice di veulladzo l\u00e9 \u00e0 \u00e8itch\u00e9 et I’an pe bu. Et le yie eunc\u00f2o Napoli\u00f3n l\u00e9 y m\u00e8nt\u00e8n. Et ad6n quan l’est yai son t\u00f2o, Napoli\u00f3n, Ilu I’ay\u00e8 po\u2011pe tan voya de b\u00e8e deun la coppa. Ad\u00f3n l’a deu: \u00abAh… \u00bb l’a po deu r\u00e8n. Et l’a \u00e8itch\u00e0…, l\u00e9 a eun llou\u00e0 la coppa Vie tchica scaill\u00e9ye bo… L’a pens\u00f3: \u00ab inque gneun b\u00e8yon po… \u00bb. Et ad\u00f3n l’a bu. Et apr\u00e9 an viille l\u00e9 (fran viille, beurta), l’a deu \u00abMondjeu, ara, llu l’a lo mimo gou de m\u00e8; m\u00e8 b\u00e8yo todzor l\u00e9 eun dr\u00e8 de halla scaille… \u00bb. Apr\u00ec \u00e0 Napoli\u00f3n l’est yai=l\u00e8i le s’om\u00ee… La pi\u00eehe le y\u00e8 eunc\u00f2o ara y b\u00f2i; eun pou la veure…<\/em><\/td>\n<\/tr>\n<\/tbody>\n<\/table>\n\n\n\n
Je sais que quand on a refait notre \u00e9table \u00e0 Vens, hameau de Saint-Nicolas, on devait transporter une grande poutre pour faire un \u00abbordon\u00bb (une poutre qui en doit soutenir d’autres) pour soutenir le plancher \u00e0 l’\u00e9table; on est all\u00e9 \u00e0 Vertosan avec un mulet (alors ils n’avaient ni rouleaux, ni camions, rien du tout; c’\u00e9tait le mulet qui tra\u00eenait le bois par terre). Il y avait aussi des hommes pour aider, mais quand-m\u00eame le mulet n’arrivait pas \u00e0 tra\u00eener. Napol\u00e9on vit cela… i1 avait l\u00e0 ses soldats… il leurs dit: \u00abAllez\u2011y! \u00bb. Les soldats s’y sont mis, une vingtaine, ils portaient la poutre comme si rien n’\u00e9tait et ils sont descendus jusqu’\u00e0 Vens… Apr\u00e8s quand ils \u00e9taient l\u00e0, ils se sont arr\u00eat\u00e9s un peu \u00e0 bavarder et ils ont mis en place la poutre (tout \u00e9tait d\u00e9j\u00e0 pr\u00e9t)… Apr\u00e8s ils sont all\u00e9s prendre \u00e0 boire dans un pot d’\u00e9tain d’un quart (alors tout le monde avait de ces pots d’\u00e9tain)… Puis ils sont sortis dehors, sur la place, et ils ont donn\u00e9 \u00e0 boire pour tous. Tous les habitants du village \u00e9taient l\u00e0 \u00e0 regarder… et ils ont bu. Il y avait aussi Napol\u00e9on parmi eux. Quand a \u00e9t\u00e9 son tour, Napol\u00e9on n’avait pas tellement envie de boire dans la coupe. Alors il dit: \u00abAh!\u00bb… C’est\u2011\u00e0\u2011dire, il n’a rien dit; il a regard\u00e9… \u00e0 un certain endroit la coupe \u00e9tait un peu \u00e9br\u00e9ch\u00e9e… Il pensa: \u00ab Ici personne ne boit…\u00bb. Et alors il but. Apr\u00e8s une vieille qui \u00e9tait l\u00e0 (vraiment vieille, laide) dit: \u00abMon Dieu! Il a les m\u00eames go\u00fbts que moi; je bois toujours o\u00f9 il y a cette br\u00e8che…\u00bb. Alors Napol\u00e9on eut des vomissements… Dans l’\u00e9table il y a encore cette poutre et on peut la voir.<\/td>\n<\/tr>\n<\/tbody>\n<\/table>\n

 <\/em>Napol\u00e9on et le faucheur<\/strong><\/p>\n\n\n\n
Un homme fauchait dans le pr\u00e9 aux \u00abSarioudes\u00bb quand passa Napol\u00e9on. (Quand il \u00e9tait jeune, Napol\u00e9on \u00e9tait un paysan). Alors il dit: \u00abDonne\u2011moi ta faux, je veux 1’essayer!\u00bb. Alors 1’autre lui repassa la faux… Napol\u00e9on se mit \u00e0 1’oeuvre et fit la moiti\u00e9 d’un andain comme il faut: il savait faucher. Le faucheur lui dit: \u00ab Tr\u00e8s bien, vous savez bien faucher!\u00bb.<\/td>\n<\/tr>\n<\/tbody>\n<\/table>\n\n\n\n
Inque dev\u00e0n la tsapalla de Cerlogne, eun sold\u00e0 de Napoli\u00f3n veun euncontr\u00e9 eun que vign\u00e8 de s\u00e8y\u00e9. Et hi sold\u00e0… (sar\u00e9\u2011t\u2011ih\u00f3 eun de pe la veulla ou qu\u00e8…) Ilu l’a vu halla f\u00f3… llu l’a beutt\u00f3 fou\u2011a lo satiro. Et hi s\u00e8it\u00f2i, quan l’est ih\u00f3 tchica protso l’a deu: \u00abEssayons\u2011nous \u00e0 qui coupe plus large?\u00bb. Se v\u00e8i que se son beun pe pr\u00e8dj\u00e0, I’an po pe fa de mo. Hice dou\u2011s\u2011ommo se son pe quett\u00f3 pai.<\/em> <\/em><\/td>\n<\/tr>\n<\/tbody>\n<\/table>\n\n\n\n
Ici, devant la chapelle de Cerlogne, un soldat de Napol\u00e9on rencontra un homme qui rentrait des pr\u00e9s apr\u00e8s avoir fauch\u00e9. Et ce soldat (c’\u00e9tait un qui habitait dans les villes ou que sais\u2011je)… vit cette faux. Il sortit alors son sabre. Le faucheur, quand le soldat fut plus pr\u00e8s dit: \u00ab Essayons \u00e0 qui coupe plus large?\u00bb. Enfin ils se sont parl\u00e9 et ils ne se sont fait aucun mal. Ces deux hommes se sont quitt\u00e9s de cette fa\u00e7on.<\/td>\n<\/tr>\n<\/tbody>\n<\/table>\n

 <\/p>\n\n\n\n
LE SOLDAT DE NAPOL\u00c9ON ET LE FAUCHEUR<\/strong> Eun Vie a s\u00e8y\u00e9 bo y Sarioude et l’est pass\u00f3 Napoli\u00f3n. Llu quan Vie dzovino Vie pai’s\u00eern. Ad\u00f3n l’a deu: \u00abbailla\u2011m\u00e9 aprou\u00e9e la <\/em>f6!\u00bb. Et ad\u00f2n l’otro l’a mollol\u00e8i la <\/em>f6… et sest beutt\u00f3 bo et l’afa bo la m\u00e8itch\u00e0 d’eun and\u00e8n \u00e0 moddo. Say\u00e8 s\u00e8y\u00e9. Et llu l’a deu\u2011l\u00e8i: \u00abBr\u00e0o, vo sodde bi\u00e8n!\u00bb. <\/em><\/td>\n<\/tr>\n<\/tbody>\n<\/table>\n

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                                                                 Alexis B\u00e9temps   in Toponymie rurale et m\u00e9moire collective (la Vall\u00e9e d\u2019Aoste), in R\u00e9cit et toponymie, Rives nord- m\u00e9diterran\u00e9ennes, 2e s\u00e9rie, Aix-en Provence, 2002.  Les toponymes sont des signes d\u2019appropriation du territoire de la part de l\u2019homme. 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