<\/a>Alexis B\u00e9temps nel 2008 – foto di Claudine Remacle.<\/p><\/div>\u00c0 la fin des ann\u00e9es 1880, Joseph Dossigny, n\u00e9 en 1871, laissa sa famille et son village pour \u00e9migrer aux \u00c9tats-Unis. Son village, Gignod, se trouve dans la Vall\u00e9e d\u2019Aoste, \u00e0 7 km de la ville d\u2019Aoste, au sein de la Vall\u00e9e du Grand-Saint-Bernard.<\/p>\n
L\u2019\u00e9conomie de cette commune, \u00e0 la fin du XIXe<\/sup> si\u00e8cle, se basait sur l\u2019agriculture (p\u00e2turages, c\u00e9r\u00e9ales, fruits) et l\u2019\u00e9levage (pr\u00e9dominance de vaches) et permettait tout juste \u00e0 la population de survivre. Aujourd\u2019hui, Gignod vit du tourisme, d\u2019un peu d\u2019agriculture, de l\u2019\u00e9levage et de l\u2019industrie (une petite usine de b\u00e2tons de ski est implant\u00e9e dans la commune), mais surtout du tertiaire.<\/p>\nLe petit hameau o\u00f9 le jeune homme vivait avec sa famille s\u2019appelle Chez-Henry, une poign\u00e9e de maisons entour\u00e9es par les pr\u00e9s et les champs.<\/p>\n
Joseph \u00e9migra donc vers un autre pays pour chercher fortune. Sans papier d\u2019identit\u00e9, il s\u2019embarqua au Havre pour arriver \u00e0 New-York, d\u2019o\u00f9 il rejoignit le Colorado et, plus exactement, le village de Emma, dans la municipalit\u00e9 de Pitkin, o\u00f9 \u00e9tait \u00e9tablie une communaut\u00e9 de Vald\u00f4tains. Il travailla d\u2019abord dans des fermes, puis, petit \u00e0 petit, il fit des \u00e9conomies et r\u00e9ussit \u00e0 s\u2019en acheter une.<\/p>\n
De temps en temps, il \u00e9crivait \u00e0 sa famille (c\u2019\u00e9tait Victorine qui tenait la correspondance avec son fr\u00e8re) qui se r\u00e9unit devant l\u2019objectif du photographe pour se faire immortaliser (voir image\u2026). Cette photo, envoy\u00e9e aux \u00c9tats-Unis, fut l\u2019occasion pour pr\u00e9senter le nouveau-n\u00e9 (Marie Marcelline) \u00e0 Joseph. Au centre de la photo, on peut voir la grand-m\u00e8re de Joseph, Marie Marguerite Norat, veuve de Jean-Joseph Dossigny, tu\u00e9 \u00e0 l\u2019\u00e2ge de 41 ans, lors du 3e<\/sup> R\u00e9giment des Socques alors qu\u2019il \u00e9tait intervenu pour d\u00e9fendre l\u2019ordre. Il fut la seule victime de ce 3e<\/sup> R\u00e9giment, r\u00e9volte de paysans contre le gouvernement en 1853, appuy\u00e9 par l\u2019\u00e9glise.<\/p>\nVers 1903-1904, deux de ses fr\u00e8res le rejoignirent : Henry (mon grand-p\u00e8re) et Victor. Le premier resta huit ans en Am\u00e9rique, puis il rentra en Vall\u00e9e d\u2019Aoste ; le deuxi\u00e8me s\u2019y installa d\u00e9finitivement. Ils travaillaient ensemble dans la ferme de Joseph, bien diff\u00e9rente des fermes vald\u00f4taines puisqu\u2019elle avait d\u00e9j\u00e0 connu la m\u00e9canisation.<\/p>\n
Joseph se maria avec une fille originaire de la Vall\u00e9e d\u2019Aoste (plus exactement de Doues) qu\u2019il connut aux \u00c9tats-Unis. La langue qu\u2019il parlait avec sa femme, ses enfants et la communaut\u00e9 des Vald\u00f4tains, \u00e9tait le patois, ses enfants n\u2019apprirent l\u2019anglais qu\u2019\u00e0 l\u2019\u00e9cole. Apr\u00e8s sa mort, l\u2019anglais prit la place du dialecte vald\u00f4tain dans la communication au sein de la famille (entre les enfants et avec leur m\u00e8re aussi). Le patois resta dans la m\u00e9moire d\u2019un de ses fils, Nasau, le t\u00e9moin de l\u2019enqu\u00eate, jusqu\u2019au moment o\u00f9 il vint nous rendre visite en Vall\u00e9e d\u2019Aoste en 1981. Mon p\u00e8re, Livio Dossigny, lui parla en patois ; il r\u00e9pondit et il fut lui-m\u00eame \u00e9merveill\u00e9 de r\u00e9aliser qu\u2019il \u00e9tait \u00e0 m\u00eame de parler une langue qu\u2019il croyait avoir oubli\u00e9e. C\u2019\u00e9tait comme un tr\u00e9sor enseveli qui revenait \u00e0 la lumi\u00e8re du jour !<\/p>\n
Histoire d\u2019une interview<\/p>\n
C\u2019\u00e9tait en 1981.<\/p>\n
L\u2019Association Vald\u00f4taine des Archives Sonores (AVAS) venait d\u2019\u00eatre constitu\u00e9e et ses adh\u00e9rents, du pr\u00e9sident au dernier inscrit, s\u2019activaient, avec l\u2019enthousiasme des n\u00e9ophytes, pour participer \u00e0 la constitution de ce fonds sonore qui voulait devenir la m\u00e9moire vald\u00f4taine. L\u2019exp\u00e9rience \u00e9tait limit\u00e9e, les comp\u00e9tences r\u00e9duites mais l\u2019enthousiasme aux \u00e9toiles. Henri Armand m\u2019avait signal\u00e9 le cas, plut\u00f4t extraordinaire, d\u2019un am\u00e9ricain, fils d\u2019\u00e9migr\u00e9s Vald\u00f4tains, d\u00e9sormais septuag\u00e9naire, qui, pour la premi\u00e8re fois, \u00e9tait venu en Vall\u00e9e d\u2019Aoste pour conna\u00eetre sa famille et son pays d\u2019origine. Son patrimoine linguistique personnel \u00e9tait particuli\u00e8rement original : l\u2019anglais, dans l\u2019une de ses vari\u00e9t\u00e9s am\u00e9ricaines et le patois, appris dans les montagnes du Colorado. Il ne comprenait ni l\u2019italien ni le fran\u00e7ais et, d\u00e8s le d\u00e9but, je dus m\u2019en rendre compte en constatant son regard \u00e9bahi quand il m\u2019a entendu employer un come mai